L'idée
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Source : Le blog de moi
C’était les débuts des années 80 et je garde encore des souvenirs vivaces de la psychose populaire; psychose qui a atteint son paroxysme en janvier 1981. Rien à voir avec l’affaire Marny, là la violence gratuite et l’horreur des actes commis en faisait un grand méchant loup fait homme en puissance pour la petite fille de 5 ans que j’étais (image qu’une majorité de parents s’est appliquée, à l’époque, à distiller chez leur progéniture, surtout les jeunes filles, probablement pour leur éviter de faire les gros titres des journaux le lendemain). C’est simple: en plus de l’interdiction plus que formelle de parler aux inconnus, il m’était désormais interdit de m’approcher des portes et fenêtres et je devais toujours être dans la même pièce que les adultes - accessoirement très pratique pour écouter tout ce qui se dit et qui n’était parfois absolument pas de mon âge -. Les soirées s’étaient transformées en longs moments d’attente où on m’envoyait au lit beaucoup trop tôt. Du coup, je passais de longues heures à me tourner et à me retourner dans mon lit, sursautant au moindre bruit, et priant pour que les premières lueurs du jour (que moi j’associais au chant du coq), synonymes de répit, arrivent vite. Car, Nicky comme tout bon vampire assoiffé de sang qui se respecte frappait la nuit… Il s’appelait, de son vrai nom, Ellux Agolphne De Freitas (parfois orthographié Defretas) dit Jerry alias Nickie Dinsley (nom dont il signe ses auditions) mais la Martinique se rappelle de lui sous le nom de Nicky et c’est sous ce nom qu’il va défrayer la chronique. 19 octobre 1980: deux habitants de Saint-Pierre découvrent sur la plage du Raisinier au Carbet, le corps sans vie de Louis Albin près de sa voiture. La cadavre ensanglanté porte des blessures profondes, faites à l’arme blanche, au thorax, au cou et à la face. Très vite, les parents de la jeune fille qui l’accompagnait ce soir là signalent sa disparition. Marcelle César, entraînée de force, séquestrée et violée (une fois) par leur agresseur, ne parviendra à s’échapper que quelques jours plus tard; se perdant deux jours dans la montagne (la ville de Saint-Pierre se trouve sur les flancs de la Montagne Pelée) avant de réussir à regagner la ville. De là, elle est conduite dans les locaux de la brigade de gendarmerie et va conduire les gendarmes sur la piste des étrangers résidant à Saint-Pierre et dans les environs en leur révélant que l’homme qui les a agressé est anglophone. Ayant réussit à identifier Nicky, sur un lot de photos, ce dernier fait l’objet d’un avis de recherches diffusé dans toute l’île puis d’un mandat d’arrêt délivré le 28 octobre 1980. Se sachant recherché, Nicky reste introuvable et commence alors les débuts de la psychose de la part de la population à l’idée de ce criminel et pervers sexuel, étranger de surcroît, en liberté dans la nature. En effet, De Freitas, 22 ans à l’époque des faits, est originaire non pas de la Dominique mais de Saint-Vincent (autre petite île de la Caraïbe). Cadet des cinq enfants d’une famille d’agriculteurs, il quitte l’école à 13 ans et travaille quelques années avec son père (jusqu’en 1976) avant que celui-ci ne mette à sa disposition et à celle de ses deux autres frères une partie de ses terres pour leur permettre de subvenir à leurs propres besoins. A la mort de son père, en 1977, le jeune Jerry se spécialise dans la culture de la marijuana ce qui lui vaut des ses premiers ennuis avec la justice de son pays. En février 1980, il s’évade de la prison de Kingston, où il était incarcéré depuis peu pour vols commis avec arme et coups et blessures. Il est à noter que les deux frères de Jerry (son frère aîné et son jumeau) ont été tués par la police en 1978 (à quelques mois d’intervalle) après s’être eux-aussi évadés de prison et réfugiés dans la montagne de South-River (lieu où la famille De Freitas avait ses terres). Commence alors une vie d’errance dans toute la Caraïbe pour celui, réputé violent par les services de police de son pays, dont le casier judiciaire porte déjà mention de 12 condamnations. Il débarque clandestinement en Martinique en février 1980, en provenance de Sainte-Lucie accompagné Emmanuel Maurice Sainte-Lucien de son état, pour chercher du travail dans la coupe de la canne à sucre. Se prétendant Trinidadien, c’est sous le surnom de “Trini” qu’il travaille comme coupeur de cannes à l’Habitation Pécoul (propriété Depaz) à Saint-Pierre. Entre temps , sa présence irrégulière sur le territoire français, ainsi que celle de son comparse est signalée aux forces de l’ordre qui effectuent un contrôle d’identité au cours duquel notre homme dit s’appeler Dinsley Nicky (combinaison du prénom de son frère aîné - Dinsley - et du nom de sa mère - Nickie - ) et être né en 1961 à Saint-John en Dominique. Il est donc expulsé vers la Dominique, en juillet 1980, mais regagne très vite la Martinique probablement avec la même filière qui lui avait permis de rentrer dans l’île la première fois même si lui prétend que se sont les autorités dominicaines qui l’y ont renvoyé le jour même (les experts psychiatres décèleront chez lui une tendance à la mythomanie). Le 28 juillet 1980, soit peu de temps après son retour, il agresse, dans la Rivière des Pères, deux jeunes soeurs d’origine anglaise âgées de 13 et 16 ans; ses anciennes voisines sur l’Habitation Pécoul. De cette première agression sur le sol martiniquais on ne sait pas grand chose (certaines sources parlent de jet de pierres) toujours est-il qu’il prend le maquis pour la première fois en se réfugiant dans les contreforts de la Montagne Pelée. Il devient alors “Nicky”, un hors-la-loi réputé dès lors dangereux et rebelle à toute autorité qui rôde à Saint-Pierre et dans les alentours. Il fait donc de nouveau parler de lui en octobre avant de disparaître trois mois (pendant lesquels il s’adonne à la boisson et à la drogue; se nourrissant de ses larcins tout en se livrant au trafic de stupéfiants), bien qu’étant recherché, pour refaire la Une des journaux fin janvier 1981. En effet, dans la nuit du 28 au 29 janvier, Nicky pénètre par effraction au domicile de Emma Hilaire, 65 ans, qu’il attaque sauvagement (son cadavre n’a cependant jamais été retrouvé) avant d’enlever sa petite-fille Catherine alors âgée de 13 ans… to be continued