L'idée
Ce blog regroupe les articles publiées par des bloggeuses. Inscrivez-vous pour pouvoir ajouter des weblogs à la liste des weblogs tenus par des femmes qui ne sont pas des suivi de vie/journaux intimes.Il s’appelait Ellux Agolphne De Freitas dit Nicky (part 3)
Source : Le blog de moi
Première partie Deuxième partie *** Le 16 février 1981, la nouvelle de l’arrestation de Nicky alimente toutes les conversations, au grand soulagement de tous, et fait la Une du France -Antilles du lendemain. L’information judiciaire ouverte aboutit dès le 14 août 1981 à deux chefs d’inculpation: meurtre, viol et séquestration d’une part et homicide volontaire, viol et enlèvement de mineure de l’autre (soit une distinction entre les deux affaires). Par arrêt du 19 mai 1982, la Chambre d’Accusation le renvoi devant la Cour d’Assises de la Martinique; la date d’ouverture de son procès étant fixé au 23 juin 1982. Cela veut tout simplement dire que l’instruction du dossier (je rappelle qu’il s’agit, durant cette phase, pour le juge d’instruction, de mettre en œuvre les moyens qui permettent de réunir tous les éléments nécessaires - information judiciaire, auditions, confrontations etc. - à la manifestation de la vérité pour que le tribunal ou la cour puisse juger en connaissance de cause) a duré moins d’un an et demi et d’ailleurs aucune reconstitution n’a été faites. Il faut dire que Nicky ne coopère pas plus que ça avec la justice . Il commence, par exemple, par refuser de parler avec ses avocats commis d’office. Ces derniers, en raison de sa complexité, sont, en effet, au nombre de trois: Maître Dinah Rioual (qui à l’avantage d’être bilingue; Nicky ne s’exprimant qu’en anglais ou en créole), Maître Raymond Auteville et Maître Charles-Henri Michaux. Quand, il se décide à communiquer avec eux, c’est pour se plaindre de la manière dont il est traité; refusant obstinément de parler des faits qui lui sont reprochés. “Nicky se trouve dans le pavillon militaire de l’Hôpital Clarac. Deux gendarmes sont chargés de surveiller sa chambre. Il a une perfusion à un bras et l’autre est menotté au lit. Alors même qu’il est paralysé [séquelle de la blessure par balle qui a permis son arrestation], les autorités policières et judiciaires craignent qu’il ne s’enfuie !” (Figures et procès: Le barreau de la Martinique 1900-2000, p.239) L’homme fait peur. Maître Rioual, qui rencontre et interroge Nicky la première, va d’ailleurs demander aux gendarmes de laisser la porte ouverte et rester assise à plusieurs mètres de son lit… Deux rapports psychiatriques établis en juillet mettent, par la suite, l’accent sur sa “froideur émotionnelle“. Il est décrit comme un étant un “pervers constitutionnel” dépourvu d’affectivité et qui se caractérise par “l’amoralité, l’inaffectivité, l’indignité, l’impulsivité, la cruauté et l’inadaptabilité“. Bien que qu’antisocial, il est intelligent et sait se contrôler. Les experts posent le diagnostic “d’une forme de psychopathie rigidifiée qui est celui d’un pervers organisé ou constitutionnel (au sens de manière fondamentale). Il s’agirait donc d’un criminel à dimension pathologique sans irresponsabilité manifeste.” Il n’est donc pas dément et ce n’est pas non plus un pervers sexuel mais il serait difficilement curable et réadaptable. Il est surtout parfaitement responsable de ses actes donc passible des Assisses. Nicky ne dira rien non plus à ses avocats sur son enfance ou sur sa vie avant son arrivée en Martinique. Il leur annonce cependant, après son inculpation, leur réserver une surprise le jour de l’audience. Ce procès, toute la Martinique l’attend. Et c’est peu que de dire qu’aux yeux de tous, Nicky est coupable. Dans les premiers temps , la population ne réclame d’ailleurs qu’une chose: la peine capitale. La mort. Nous sommes en février 1981. Même si la dernière exécution à la guillotine remonte déjà à quatre ans, la peine de mort est encore en vigueur en France et certains crimes reprochés à De Freitas en sont passibles. La peine capitale sera abolie au début du mois d’octobre 1981 soit 8 mois avant son procès. C’est la foule des grands jours qui se presse sur les grilles du Palais de Justice de Fort-de-France en ce 23 juin 1982. Tout le monde veut voir le “monstre”. Les témoins s’accordent d’ailleurs pour parler d’une ambiance électrique et d’une foule hostile hurlant sa haine sous forme d’insultes et de menaces de mort à cet étranger “venu semer la mort et la désolation“. Le jeune homme de 24 ans paraît presque frêle dans son fauteuil roulant mais semble indifférent au tumulte et à l’agitation autour de lui. Il va demeurer totalement impassible tout au long de son procès ne regardant personne et coopérant à peine. Cette hostilité va être palpable toute la durée du procès: “Le Président de la Cour eut à ramener l’ordre à plusieurs reprises, ce qui n’empêchait pas la foule, véhémente de manifester ouvertement sa haine à l’égard de l’accusé. A une suspension d’audience, quelqu’un s’était même approché pour frapper l’accusé et le service de sécurité de l’audience avait dû s’interposer. L’assistance prenait également a parti les avocats de la défense, ne comprenant pas comment ils avaient pu accepter de défendre un tel “monstre”. Le bâtonnier de l’Ordre avait conseillé aux avocats de la défense de rester en robe pendant les suspensions d’audience pour ne pas risquer d’être bousculés. A la fin de chaque journée d’audience, ils devaient attendre dans le vestiaire des avocats le départ du public pour s’en aller à leur tour.” (Figures et procès: Le barreau de la Martinique 1900-2000, p.241) Le premier jour d’audience, en plus de cette ambiance exceptionnelle, plusieurs événements notables sont à signaler. D’une part, la défense arrive à obtenir que les deux affaires ne soient pas jugées séparément chacune en deux jours par deux jurys différents comme prévu mais, argumentant que les faits reprochés sont connexes, indivisibles qu’ils se situent à une époque très rapprochée dans le temps , que De Freitas soit jugé par un seul et même jury en trois jours. D’autre part, alors qu’il commence à être interrogé par le Président de la Cour, Nicky lui répond dans une langue… inconnue. C’était la fameuse surprise qu’il avait promis à ses avocats à qui, ces derniers ne l’apprendront qu’après leurs plaidoiries, il ne faisait pas confiance. Ils parviendront tout de même, à la faveur d’une suspension d’audience, à le convaincre de répondre dans une langue intelligible sans pour autant qu’il coopère plus que d’habitude à la reprise des débats ne répondant que brièvement aux questions posées. Par contre, le huis-clos sollicité, toujours par le défense, pour l’audition de Catherine H. se heurte à l’opposition de la partie civile représentée par Maître Albert Elana (pour les familles de victimes) par l’Avocat général Guy Paris -Leclerc, substitut du Procureur général de la cour d’appel de Fort-de-France . La victime sera auditionné publiquement le lendemain matin. Le deuxième jour voit donc se succéder à la barre un certain nombre de témoins dont les deux jeunes filles violées par ce dernier. Marcelle C. ne varie pas dans ses déclarations à la barre et l’accuse d’avoir tué Louis A. puis de l’avoir, elle, forcé à le suivre dans la montagne où il l’a violé. Nicky nie le meurtre le liant les événements à une affaire de drogue qui aurait mal tourné déclenchant une bagarre entre les deux hommes. Louis A. aurait appelé la jeune fille à l’aide et ordonné à celle-ci de prendre un coutelas dans la voiture. Nicky se serait alors servi de son corps comme d’un bouclier pour se protéger des coups qu’elle tentait de lui porter; coups qui s’avéreront fatals pour Louis A. Elle aurait alors tenté de prendre la fuite dans la voiture avant qu’il ne la rattrape. Elle aurait ensuite volontairement accepté de le suivre et d’avoir des relations sexuelles avec lui. Catherine H. raconte quand à elle avoir vu Nicky frapper sa grand-mère, avant que ce dernier ne l’emmène de force et la viole. Il a également nié le meurtre de la grand-mère; accusant un complice. Il faut ici souligner que le corps n’a jamais été retrouvé. Le troisième jour fut réservé au réquisitoire et aux plaidoiries. Celles de Maître Elana et de l’Avocat général qui, lui, requit la réclusion perpétuelle à perpétuité et celles des avocats de la défense (Maître Rioual la première puis Maître Auteville et Maître Michaux) qui demandèrent l’acquittement pour le meurtre de Emma H., la grand-mère. to be continued