L'idée
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Source : Le blog de moi
France -Antilles du vendredi 19 décembre 2008. Parce que c’est la période des rétrospectives et parce que finalement l’information ne semble pas avoir fait grand bruit dans les médias nationaux (un peu à l’image de ce qui s’est passé en Guyane avec la grève contre le prix de l’essence jusqu’à ce que deux ou trois médias “alternatifs” ne relaient l’alerte d’internautes ultra-marins indignés du non traitement de l’information). L’Histoire retiendra donc peut-être que le jeudi 18 décembre 2008, les élus martiniquais réunis en Congrès (spécificité des régions d’outre-mer monodépartementales, depuis la loi d’orientation pour l’outre-mer du 13 décembre 2000, réunissant le conseil général et le conseil régional et ayant vocation à formuler des propositions d’évolution institutionnelle) ont adopté à une très large majorité la volonté d’évoluer désormais statutairement dans le cadre de l’article 74 de la Constitution en plus de retenir le principe d’une chambre unique, élue à la proportionnelle. Cette décision vient relancer l’évolution institutionnelle que le résultat du référendum local du 7 décembre 2003 avait stoppé dans son élan. Souvenez-vous, la question posée alors était la suivante : “Approuvez-vous le projet de création en Martinique d’une collectivité territoriale demeurant régie par l’article 73 de la Constitution, et donc par le principe de l’identité législative avec possibilité d’adaptations, et se substituant au département et à la région dans les conditions prévues par cet article ?” Alors que ”l’île sœur” déclinait poliment mais fermement l’offre (avec 72,98% des suffrages exprimés); le “non” ne l’emportait que d’une courte tête en Martinique avec 50,48% des suffrages exprimés et une abstention à 56,06% (contre 49,66% en Guadeloupe). Le projet de réforme institutionnelle préconisant la création d’une collectivité administrée par une assemblée unique, élue au scrutin proportionnel, se substituant au département et à la région, porté par une majorité d’élus martiniquais, était donc enterré rejeté. “Rejeté” et non pas “enterré” puisqu’en gros sorti par la petite porte après une campagne qui pris très vite des allures de poker-menteur (où les enjeux de pouvoir et les querelles de personne ont fait bouger les lignes de l’échiquier politique local comme jamais) voilà donc le débat sur l’évolution institutionnelle de l’île qui revient par la fenêtre en Martinique avec entre-temps un passage, pas anodin pour un sou, du 73 au 74 et d’une identité législative différente à un possible changement statutaire. Maintenant, il est vrai qu’il reste encore du chemin à parcourir pour les partisans de ce projet politique . La suite, c’est encore le France -Antilles, dans un article paru la veille du Congrès, qui en parle le plus clairement : “Une fois, le texte ou les textes adoptés par le congrès, le Conseil régional et le Conseil général examinent séparément le ou les textes. Et si les deux collectivités adoptent sans changement la mouture votée au congrès, leurs présidents transmettent les documents au gouvernement . Et c’est le premier ministre qui décide de saisir le président de la République. Ce dernier a toute liberté pour poursuivre le processus de changement statutaire. Un débat sans vote est organisé au Parlement. Après ceci, le chef de l’Etat décide ou non de la consultation de la population. Et si cette dernière approuve l’évolution adoptée par les élus, alors un projet de loi organique est déposé au Parlement et c’est lui qui définira la nouvelle collectivité Martinique.” Le 18 décembre dernier, le Congrès a donc choisit de proposer d’évoluer dans le cadre d’une nouvelle collectivité autonome. Il s’agira pour eux (nos même élus de nouveau réunis en Congrès cette fois à l’initiative et donc sous la présidence du Conseil Général) de décider dès janvier 2009 (calendrier acté) du degré d’autonomie souhaité en fonction de l’élargissement des compétences demandé. “De ce fait, l’élargissement des compétences de la nouvelle collectivité dictera le statut de la Martinique: Région, Collectivité ou Territoire autonome.” Et la Guadeloupe dans tout ça, me direz-vous ? Quid d’une éventuelle évolution statutaire ? Victorin Lurel, président du Conseil Régional de la Guadeloupe, a tout simplement coupé court à toute velléité d’initiative de ce genre, arguant du respect du choix fait par la population en 2003. Alors c’est quand même un comble pour la Martiniquaise que je suis de voir nos élus essayer de nouveau de me faire prendre des vessies pour des lanternes me vendre de nouveau le produit. On me parle d’éveil véritable de la conscience identitaire du peuple martiniquais, on m’exhorte à ne pas, par peur (comme la dernière fois), immobiliser l’Histoire cela dans l’intérêt et dans l’intérêt seul dudit peuple, on tente de m’expliquer que nos élus ont usé et abusé des leviers d’autonomie et de développement déjà existants en faisant fi de leurs querelles hélas mille fois hélas sans succès, on m’encourage à regarder ailleurs comment ça se passe trop bien, on prétend que c’est la voie naturelle des choses, qu’il s’agit d’arrêter d’être aux ordres de l’Etat français colonialiste d’être enfin responsables et non plus assistés (oui parce pour les autres départements français – comprendre “hexagonaux” - on parle de solidarité nationale et c’est normal mais dès qu’il s’agit des DOM c’est de l’assistanat et c’est très mal… c’est comme ça) et qu’il ne s’agit absolument pas d’une affaire d’élus… et de pouvoir personnel. Le problème c’est que je n’en suis pas convaincue. Je ne suis pas convaincue que cette nouvelle initiative de nos élus soit le fruit de la volonté profonde du peuple martiniquais (mais j’y reviendrai dans un autre billet). L’argument d’une identité martiniquaise et d’une conscience du peuple martiniquais quelque peu brimée ? qui s’épanouirait enfin et pleinement dans un autre cadre statutaire est, par ailleurs, trop simplificatrice sinon trop simpliste pour me convaincre. De plus, je ne comprends pas cette précipitation, cette volonté de tout accélérer le cours de l’Histoire compris (en tout cas c’est l’impression que toute cette histoire me donne) au moment même où la commission Balladur se penche sur la question d’une simplification des échelons administratifs dans le cadre d’une réforme voulu par le Président himself. N’était-ce pas ce que voulaient, sans arrière pensée aucune (n’est ce pas ?), nos élus en 2003 ? Est-ce bien réfléchit de vouloir de lancer dans une pareille aventure (appelons un chat un chat) à l’aube des effets d’une crise économique mondiale sans précédent ? A moins que comme un fameux nuage radioactif, elle ne s’arrête, cette crise, aux rivages de nôtre magnifique île… Nos élus auraient-ils les réponses que d’autres n’ont pas ? And least but not last, la présence aux manettes d’Alfred Marie-Jeanne, populiste populaire leader indépendantiste - dont les déclarations sont parfois dignes de celle d’un Président de la République tout puissant et omniscient alors qu’il n’est que Président de Région - n’est pas rassurante. L’idée de confier au personnage des pouvoirs plus conséquents ou pire de lui permettre de les concentrer ne me paraît pas excellente et m’effraie même un peu. Finalement, je me retrouve avec le même sentiment qu’en 2003: celui qu’il y a cong sous rocher anguille sous roche et qu’en fait c’est bien le peuple martiniquais (objet semble-t-il de toutes les attentions) qui risque d’être le dindon de cette tragi-comédie farce. 2009 risque d’être une année décisive. Wait and see quelles compétences seront demandées puis comment les choses évoluent… Ah. Dernière chose: qui a déclaré à l’Express, en mars 2007, à propos de relancer le processus institutionnel à la Guadeloupe et à la Martinique, malgré l’échec du référendum de 2003 : “Je ne vois pas d’urgence à relancer un processus institutionnel rejeté par les populations locales en 2003, alors que toute notre énergie doit être tournée vers le développement économique, l’amélioration de la sécurité et les conditions de logement. Ne nous trompons pas d’objectif: les questions institutionnelles ne doivent pas masquer les vraies priorités de l’action publique.” Je suis d’accord avec lui; c’est assez rare pour être souligné. En espérant qu’il n’a pas changé d’avis…