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Mouvements post-électoraux en Iran, vus par Twitter

Publié par Natacha QS le Lundi 15 Juin 2009, 21:52 dans la rubrique Bric à brac - Version imprimable

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Troisième jour de la révolution iranienne de 2009 Voir le billet avec de nombreux liens et contacts sur Twitter.

Avec plusieurs amis et contacts, je mène une expérience d’un nouveau type : relayer des informations et des commentaires en Technorati réel sur les événements en Iran. Depuis samedi soir, nous avons fait un travail collectif (crowdsourcing) pour vérifier autant que possible les sources sur twitter. Trouver les bonnes personnes à suivre (”follow”) basées pour la plupart en Iran. Plusieurs d’entre nous ont veillé deux jours et deux nuits de suite. En Technorati réel, nous avons partagé avec eux des moments tendus, comme lorsque, toujours samedi soir, ils ont eu des coupures de téléphone, la BBC a été censurée, les SMS ne passaient plus, le réseau mobile était inaccessible et parfois, il y a eu aussi des coupures d’électricité. Malgré cela, plusieurs d’entre eux ont trouvé, comme les Geeks Chinois par exemple, des failles permettant de contourner la censure. Utilisant des proxies par exemple. Certains expliquaient qu’ils pouvaient envoyer des tweets, mais ne pouvaient lire ceux des autres. Les manifestations spontanées de samedi soir ont rapidement été reprimées. Les messages qui circulaient pouvaient être vérifiés après coup et nous permettre de reconnaître les bons canaux d’information, et ceux qui avaient la prudence de mentionner quand ils n’étaient pas certains de la véracité de leurs propos. Des étudiants étaient dans un profond désarroi, lorsqu’ils ont constaté que les médias internationaux, notamment CNN, ne couvraient pas du tout les événements. On sentait clairement que si l’attention des opinions publiques mondiales n’étaient pas portée sur eux, la répression pourrait être bien plus sévère et violente. Les journalistes sur place ont eu énormément de difficulté à travailler, comme ils ont pu le relater dans leurs reportages diffusés malgré tout dès le dimanche. Une équipe d’ABC a vu son matériel saisi (caméra et cassettes), mais elle a enregistré et diffusé plusieurs séquences tournées au téléphone portable. Idem pour une équipe italienne. Dans les multiples vidéos qui ont circulé via YouTube montrant les manifestations, on voit un geste désormais classique, des bras levés filmant avec des mobiles. Des photos amateurs ont également circulé via TwitPic. Alors que sur les réseaux sociaux, on prenait conscience des événéments qui se déroulaient, un vent de mécontentement se levait : pas un mot sur CNN ou les grands médias. C’est à ce moment-là que le hashtag #CNNFAIL est apparu. Et le mot est passé pour faire remonter ce thème de conversation dans le TOP 10 de Twitter. Espérant attirer l’attention des médias. La crainte étant qu’un drame ne se déroule là, sans que personne n’en parle. Il y a vingt ans, CNN avait acquis une solide respectabilité avec la couverture des événements de la place Tiananmen. Les “digital natives” se retrouvaient consternés face à un téléviseur muet. C’est peut-être la première fois que le décalage entre le traitement des médias et celui des médias sociaux était aussi palpable pour tous. Dans la nuit de samedi à dimanche, des infos passaient par bribes, car les iraniens avaient de très grandes difficultés à trouver des moyens de se connecter. On s’inquiétait de leur silence. Ces tweets étant comme une lueur dans cette obscurité. Et leur désarroi filtrait. Utilisant des proxies ou envoyant leurs messages directement via l’API de twitter par exemple. Certains expliquaient qu’ils pouvaient envoyer des tweets via le robot mis en place par ping.fm sur messagerie instantanée GoogleTalk, mais ne pouvaient lire ceux des autres. Des sites d’infos iraniens ont été bloquées ou pirtatées. Le mot s’est répandu comme une traînée de poudre, notamment via twitter : crier des “Allah o akbar” et des “mort au dictateur” depuis les toits et les balcons de la capitale (action à la fois efficace et relativement sûre pour la population). La nuit de samedi à dimanche a retenti de ces slogans, et l’appel a été lancé aujourd’hui de renouveler l’expérience tous les soirs, de 9h à 11h. Dimanche, la tension est montrée d’un cran. Les descentes de police dans les universités ont été relayées. La nuit dernière (de dimanche à lundi), il y a eu des attaques dans les internats des universités, assiégés par les forces de l’ordre et apparemment par des milices Les informations circulant n’étaient peut-être pas tout à fait justes, mais après tout, lors d’événements de ce type, les médias se contentent eux aussi bien souvent de supposer. Ce qui compte, c’est de nuancer, de préciser. Sous la pression des médias sociaux, aujourd’hui, lundi, CNN a ouvert plusieurs comptes sur Twitter pour relayer les articles et reportages. Les moyens de contourner le verrouillage d’ Technorati circulaient et ricochaient sur twitter, pour espérer atteindre sur place ceux qui tentaient de partager leurs infos ou leurs commentaires. Nous avons beaucoup partagé nos sources et utilisé la recommandation pour conseiller qui suivre sur twitter. Ainsi, certains twitters sont passés de quelques dizaines de followers à des centaines voire des milliers. Et quand des comptes diffusaient des informations fausses, des alertes étaient aussi transmises pour recommander de ne pas les suivre et de ne pas les rediffuser. Un bel exemple d’intelligence collective. Depuis plus de quatre ans, nous pensons dans MemoireVive.tv que le téléphone mobile et les réseaux sociaux vont bouleverser le paysage médiatique et Technorati. Les participants des réseaux sociaux actifs ont bien compris le rôle actif qu’ils pouvaient jouer à distance : celui de relayer, d’amplifier les informations, pour leur donner une portée Technorati. Espérant bien sûr que les journalistes couvrent les événements et que les politiques jouent aussi leur rôle. La vitesse de diffusion des tweets peut être puissante. Par exemple, Sacha et moi, avons à nous deux un réseau de plusieurs milliers de personnes, car nous diffusons sur toutes les plateformes sociales et augmentons ainsi nos audiences. A cela s’ajoute plusieurs de nos proches comme Tatiana, amis ou contacts. Rapidement, certains messages touchent des milliers de personnes. Et quand certains atteignent les médias, bien sûr, cela touche des millions ou des centaines de millions de personnes. Accéder à ce flux de commentaires ou d’informations est rapide. Pour en extraire du sens ou de la valeur ajoutée, il faut du Technorati, le vôtre, pour apprendre à identifier des sources, et le Technorati de vos contacts qui participent au filtrage et à la validation. Cet investissement de Technorati partagé porte ses fruits puisqu’il permet de se repérer dans cette forêt vierge. Ce qui change aussi la donne, si on fait une comparaison avec les événements de Tiananmen en 1989, c’est que la frustration est beaucoup moins grande quand on peut discuter avec des personnes sur place et leur porter une aide à distance, comme à cet étudiant qui a demandé à Tatiana de contacter CNN. En quelques dizaines de minutes, elle a écrit un mail et plusieurs autres personnes ont repris le texte pour écrire à la rédaction. Les réseaux sociaux impliquent l’utilisateur. Chacun est un canal. L’individu avec son réseau participe aux processus de construction de l’information, et les journalistes ne peuvent que bénéficier de l’aide de ces vigies. Merci à tfsalomon, sachaqs, parizot, jeanrem, emergent2007, katjato. Partager ce billet :


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