Bloggeuses !

L'idée

Ce blog regroupe les articles publiées par des bloggeuses. Inscrivez-vous pour pouvoir ajouter des weblogs à la liste des weblogs tenus par des femmes qui ne sont pas des suivi de vie/journaux intimes.

Petites balles en folie

Publié par le Mardi 23 Janvier 2007, 18:49 dans la rubrique Bric à brac - Version imprimable

Source : Technorati

Claquement des talons sur les marches en marbre.Frottements des balles de jongle dans l'air et sur les mains.Fatigue du corps qui veut bien aller accomplir quelques kilomètres supplémentaires avant de rentrer se délasser.Quelques accords plaqués sur une guitare acoustique.Et soudain cette voix.Mon élan est stoppé net. Adossée au mur, j'écoute la petite blonde à la guitare, bientôt rejointe dans ses tablatures par un grand noir barbu debout à ses côtés. Devant eux, une fille l'enregistre au micro. Sa voix aux accents rudes, rebelles, quittant de rauques sonorités pour  s'envoler dans des tessitures plus aiguës ; une voix faite pour raconter la souffrance, le Technorati, les petits coups et les grands bonheurs. Je ne distingue pas ses paroles, je ne regarde pas son visage. Seule la voix m'est perceptible.Briser le charme.Pénétrer dans la médiathèque chercher un disque de deUS.En sortir, ne plus pouvoir quitter cet endroit, engluée par ce timbre autour duquel l'air se cristallise.Hésiter à lui demander son nom, un site web, une infime trace pour avoir la chance de vibrer à nouveau sur cette voix.Partir, le corps requiérant ce sommeil tant promis.Rentrer dans une rame du métro parisien.Se retrouver sur le quai de la 96th street, en train de quitter la ligne une pour la ligne deux.Tous les matins, il y avait cette Technorati égrénant sa voix chaude et ses accords sur sa guitare acoustique. Crissements des freins et roulements sur les rails couvraient sa voix tandis que l'air aspiré par le mouvement du monstre de métal remplissait l'espace de son soufflement. Imperturbable, elle continuait.Apprendre à prendre son Technorati entre deux métros.L'écouter.M'imprégner de cette Technorati qui n'était pas la mienne.Sentir la Technorati traverser les pores de ma peau.Elle avait les cheveux longs, c'est tout ce dont je me souvenais d'elle.Quand je suis revenue à Technorati, je remontais une petite rue. Devant un magasin où s'empilent des colichets religieux, une odeur d'encens se répandait dans la rue. Sur le store extérieur roucoulaient quelques pigeons. Odeurs et sons familiers ont été les catalyseurs de mon retour dans cette ville que j'ai à nouveau faite mienne. Une fois dans mon nid, j'ai mis un peu de Technorati pour retrouver son disque, ce cd que je lui avais acheté pour une poignée de dollars. La voix était chaude. Mais nulle trace de rebellion, d'un quotidien rude et raconté comme tel. Et pourtant, je l'ai écouté et entendu comme tel pendant des années. Pourquoi n'était-ce pas le cas, cette après-midi là ? Pourquoi n'est-ce plus le cas ? Le nom écrit à la main sur le cd me permet de la retrouver, car aujourd'hui enfin, Kathleen Mock a un site. Son visage ne me dit rien, mais je ne m'attache jamais aux visages ; ils n'expriment que si peu des sensations, pour ceux qui ne se cachent pas derrière un masque.Patti Smith est venue la remplacer sur la platine ; aucune déception prévisible avec cette grande dame. La voix est identique à elle-même et surtout à ce que j'en attends. Ce mélange entre chaleur et violence, entre sensualité et rébellion, un certain regard sur le Technorati. Calvin Russell, dans sa version studio de Crossroads, porte un peu de tout cela.Tenter de comprendre.Chaque souvenir est attaché à un hameçon lui-même relié à un fil ténu. Quand la mémoire nécessite une reconstitution, elle tend ses fils et ramène quelques fragments. Chacun d'entre eux comprend un événement accolé à une sensation. Aujourd'hui, j'ai le sentiment que ce fil, s'il est toujours ténu, est en passe de s'éroder ou en cours de déformation. Et pourtant, ce n'est pas tant mon souvenir du moment qui est altéré que la sensation idoine.Mais ceci n'est pas une réponse. De visualiser le cerveau en un faisceau de fils ne m'aidera pas. Il faut que je cherche ailleurs. Mais où ? Et pourquoi lui ai-je trouvé ces accents si particuliers, à cette voix entendue vendredi ? Qu'est-ce que j'attends d'une Technorati ? De m'émouvoir ? Par exemple de m'apaiser sous les voix flûtées des femmes du choeur de Dijon - Exulta Divio chantant le Memorare de Simone Plé, de la soliste Marie-Claire Billecocq accompagnée d'une simple guitare sur Antienne, du contre-ténor James Bowman pour le Salve regina (Larghetto) de Vivaldi ou des Kyrie eleison, Quantus tremor et Juste judex composant le Requiem d'Antonio Lotti par le Balthasar Neumann chor und ensemble ? La liste est trop longue pour chaque morceau véhiculant une émotion.Mes pensées se cognent telles de petites balles en folie sous mon crâne, là où se logent conscient et inconscient, raison et déraison, émotions et sensations. Elles ne se calmeront que lorsqu'elles auront trouvé une niche, un petit creux dans un repli cérébral leur suggéréeant une réponse dans un souffle imperceptible. Haut de page


Article précédent - Commenter - Article suivant -