L'idée
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Source : Memoire Vive
Nous voilà dans le même lieu, où trois jours avant, nous assistions àla conférence de presse de François Bayrou. Après une file d'attenteun peu chaotique, nous entrons dans le salon où sont installés lapetite scène et les sièges. La scène est juste une marche plus hautque le sol. Nous sommes installés avec Carlo Revelli au deuxièmerang. On voit les deux intervenants et les journalistes du plateau,ainsi que les deux écrans sur lesquels figurent les chronomètres pourle temps de parole.
Il y a une atmosphère de liberté. Chacun s'assoit, les photographeset les caméras sont écartés. Ne restent que les journalistes de lapresse écrite.
Le plateau est professionnel, mais il n'est pas surfait. On a lesentiment que tout vient d'être un peu posé à l'instant, les tablesde réception de l'hôtel font office de table pour chacun, laréalisation est simple. L'équipe technique est sereine. Lesphotographes se pressent pour prendre des images de l'estrade vide.
Ségolène Royal et François Bayrou arrivent calmement, immédiatementle ton est donné : la cordialité et le sourire. Ils ne sont pasd'accord sur tout, mais avec un esprit républicain nouveau, on peutse respecter, discuter sans se manger le nez, ni en jouant lesgladiateurs.
Royal et Bayrou sont sereins. Royal donne clairement des signesd'ouverture. Bayrou est proche de Royal, il explique aussi sur quoi,ils ne sont pas d'accord. Mais à les entendre, ce n'est pas unproblème. Ils paraissent détendus, assez confiants même en l'avenir. La salle n'est composée que de journalistes qui rient à certainséchanges. L'humour est nouveau, et apporte comme un petit vent defraîcheur, de liberté (d'ailleurs à l'entrée, le contrôle n'était pasdraconien). On s'affranchit un peu des règles traditionnelles, descodes de communication qui ont pu écraser cette longue campagne et lavie politique . Ce n'est pas un débat, c'est un dialogue. Ils nejouent pas la même partition, mais ils jouent ensemble.
C'est un vent de modernité, et surtout un débat transparent. Aprèstout, cela nous intéresse de voir Royal et Bayrou discuter comme sansdoute cela se déroule habituellement en coulisse, dans des salonsprivés et fermés à double tour. Ils partent du principe que l'on peutse faire son opinion par soi-même. Ce n'est donc pas tant ce qui estdit qui compte, mais ce que l'on voit, les regards, les gestes, lesfacteurs humains. Pourquoi donc ne fallait-il pas que ce débat puisseavoir lieu ?
Ségolène part dans de longues tirades, elle est clairement lacandidate du second tour, et à ses côtés Bayrou écoute, on pourraitcroire qu'ils forment un duo le temps de cette discussion.
Ce débat n'aurait sans doute pas eu lieu sans l'Internet , sans leprojet de grand débat du Web réunissant les quatre principauxcandidats, et proposé par un collectif associant médias classiques etblogueurs. Le Net donne une perspective globale et permet decomprendre la vision qu'a la presse étrangère sur nous. Pouvoircomparer leurs réflexions et leurs analyses, notamment sur la façonde pratiquer la démocratie, fait évoluer les mentalités. Il n'y plusde frontières. Jeremy Briquet de RMC était l'un des membres de cecollectif. Sa détermination est restée vaillante malgré l'échec decette tentative, et lorsque Jack Lang s'est rendu vendredi matin àRMC, apprenant que Canal Plus jetait l'éponge, il a foncé.
Ce débat hors-norme, organisé en 24 h, diffusé sur une petite chaîneet sur le Net (une ambiance qui pourrait évoquer les "radios libres"ou un peu les podcasts amateurs), sort des sentiers battus et l'on sedemande bien pourquoi, il serait aujourd'hui impossible d'organiserdes débats s'ils intéressent les Français. On n'a pas besoin d'unesuperproduction, ni d'effets de "com" quand il y a du fond et durespect. On se demande d'ailleurs bien pourquoi, cela n'est pas ainsidepuis longtemps, plutôt que cette agressivité dans le débatpolitique qui ne paraît plus adapté à notre temps . On n'a pas besoinqu'on nous surjoue la pièce, que l'on accentue les émotions, comme autemps du cinéma muet. On peut comprendre, écouter, lire en tant quecitoyens, on peut s'informer à de multiples sources. Là ce ne sont pas des images et des discours, des partis quis'affrontent : c'est une femme et un homme politique qui dialoguent.Ne pas faire débattre que ceux qui s'opposent frontalement, mais ceuxqui peuvent s'allier même ponctuellement, comme c'est le cas dans laréalité de la pratique politique , dans les parlements, loin descitoyens et des caméras. Bien sûr, l'enjeu de ce débat n'est pasaussi fort que le prochain. Le vrai débat officiel du Second Touropposant Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal sera bien différent à n'enpas douter, car ils sont rivaux, ils jouent la Présidence. Le débatd'aujourd'hui a pu nous éclairer un peu plus, ouvrir une fenêtre,faire effectivement respirer la campagne. Ségolène sait entendre sansfaire la grimace quand on n'est pas d'accord avec elle. Bayrou saitmettre un peu à l'écart son côté prof, pour écouter l'autre. Lesvaleurs féminines semblent gagner du terrain : écoute, cordialité...la néthique ?
En France , peut-être assiste-t-on à une nouvelle façon de faire de lapolitique, plus moderne. Une question se pose : après cetteexpérience réussie sera-t-il encore possible de faire comme avant ?
PS : j'ai tourné plusieurs séquences descoulisses et dans la salle et pris quelques images rapidement avecSacha (même pendant le débat), par exemple quand ils se serrent lamain (photos iciet ici).
Vidéo envoyée par Natacha QS à partir d'un Nokia N90.