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Psaume 151-Léo Ferré

Publié par Lilou la teigne le Mardi 14 Août 2007, 23:25 dans la rubrique Bric à brac - Version imprimable

Source : Technorati

je suis retombée sur des textes de Léo oublié au tréfonds de ma mémoire.

J'avais oublié combien il pouvait me toucher.

Celui-ci en particulier. Les psaumes sont écrits sur les magnétophones

Les chorus ont un nègre à chaque mélopée

Les bouches font des langues sept fois retournées

Miserere Seigneur du fond des microphones

La nature d'acier pousse des fleurs chromées

Le juste en cadillac s'encense du cigare

Le courrier meurt de peur dans les aérogares

Miserere Seigneur du fond des destinées

Le boulanger joue la tournée au pain azyme

Les moutons des prisons se laissent tricoter

Et le coq de Saint Pierre a tranché son gosier

Miserere Seigneur du fond des anonymes

Les condamnés jouent au poker leur appétit

Et laissent aux suivants leur part de Jamaïque

Le coup de grâce dans le vent est liturgique

Miserere Seigneur du fond des piloris

L'estomac du commun se met en diagonal

Le traiteur donne aux chiens sa pitié tarifée

Les boueux ont glissé sur des peaux d'orchidées

Miserere Seigneur du fond des capitales

Les banques de l'amour sont pleines à craquer

Les "je t'aime" publics assomment les affiches

Les adolescents ont des lèvres postiches

Miserere Seigneur du fond des oreillers

Les vitrines regardent passer les voyelles

Les ortolans dans le commun prennent le frais

Et le saumon fumé boude le tapioca

Miserere Seigneur du fond de nos gamelles

Les femmes en gésine inondent le pavé

Les mineurs font un blanc à chaque lavabo

Les souffleurs de Baccara font des bancos

Miserere Seigneur du fond des encavés

Les brebis de Panurge attendent au vestiaire

Les visas escomptés percutent sur l'azur

La queue chez l'épicier jouit contre le mur

Miserere Seigneur du fond des muselières

La ville a dégrafé son corsage de mort

Les balles dans la rue ont la poudre nomade

Les pavés font la main aux yeux des barricades

Miserere Seigneur du fond des thermidors

Les temples sont cernés et sentent le roussi

Les magasines font la pige aux évangiles

Et les chemins de croix se font en crocodile

Miserere Seigneur du fond des crucifix

Le journal titre en deuil la Putain des frontières

La fleur fane au fusil et meure sous un drapeau

Et les téléscripteurs nous mènent en bateau

Miserere Seigneur du fond de nos galères

La maladie veille au chevet des ganglions

Le coeur est métronome et la vie est Technorati A l'hôpital les symphonies sont catholiques

Miserere Seigneur du fond des pulsations

La fonderie sur le tour égrène son rosaire

Le tueur de la rue a gagé son beefsteak

Et celui de Kobe n'aura pas un kopeck

Miserere Seigneur du fond des mercenaires

Le verbe s'est fait chaire dans le ventre rusé

La putain Marguerite a la peau qui dépasse

Le caillot dans les plis sinueux se prélasse

Miserere Seigneur du fond des pubertés

Les bourgeois de la rue ont piqué la vérole

Et réclament partout de faux médicaments

Qu'on leur sert en faisant claquer toutes leurs dents

Miserere Seigneur du fond des carmagnoles

Les sextants sont en grève au coeur des matelots

Les oiseaux carburés fientent les équipages

Le soleil fait la course avec le paysage

Miserere Seigneur du fond des paquebots

La trouille a revêtu la terre de sa housse

Le plat de contrition se vend au marché noir

Le curé fait du supplément sous l'ostensoir

Miserere Seigneur du fond de la ressource

Les condamnés jouent au poker leur appétit

Ils vous laissent Seigneur leur part de solitude

Le service est compris nous avons l'habitude

Descendez donc seigneur de notre connerie


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